Le travail de Monsieur Hulot

Nicolas Hulot, après avoir résisté aux avances de trois présidents, vient de céder à celles du quatrième. Sans doute que le champion apolitique d’une écologie à visage humain a obtenu un minimum d’assurances que ses inquiétudes sur les périls qui menacent la planète seront prises en compte. A suivre...

 

Je me souviens de René Dumont, en 1974, premier candidat écologique à une présidentielle. Avant tous les autres, il exhorta les politiciens à choisir entre « l’utopie ou la mort » et donc à remettre en question les dommages collatéraux du capitalisme « agressif ».

Depuis, nombre de scientifiques spécialisés dans les questions de pollutions alertent nos dirigeants sur la nécessité de contenir le réchauffement climatique qui détruit la Terre. Ils sont relayés par des politicards opportunistes qui voient dans la dénonciation hystérique des risques écologiques une opportunité de parvenir au pouvoir. Ils nous vendent de l’écologisme pour de l’écologie.

Plus sérieusement, les pays développés (victimes de moult désordres climatiques) se réunissent régulièrement – COP 21, 22 etc... - pour confronter des rapports, des inquiétudes, des propositions. A chaque fois, on rejoue la même pièce. Des experts font un constat, de plus en plus dramatique, de la situation avec force, graphiques, chiffres, pronostics funestes. A chaque fois, des représentants des nations s’empoignent, des nuits entières, pour trouver un compromis qui concilie (en apparence) impératifs écologiques et nécessités économiques. A chaque fois, on annonce des intentions, parfois des engagements, assortis de commentaires éclairés sur la catégorie dans laquelle il convient de ranger cette pantomime : échec ou réussite. A chaque fois, le citoyen (sommé par le politiquement correct de couper l’eau du robinet pendant qu’il se brosse les crocs) ne voit rien venir. Les hommes continuent à courir après l’argent sans souci pour leur biotope.  Et le cours de l’apocalypse annoncé reprend de plus belle.

Mais Chien Gentil, qui connaît son Jean Yanne sur le bout des doigts, n’est pas dupe... « Tout le monde veut sauver la planète, mais personne de veut descendre les poubelles ».

Toute la question est là. Le réchauffement climatique, comme toutes les catastrophes écologiques, sanitaires, alimentaires, nucléaires qui nous menacent sont totalement et directement consécutives au productivisme d’abord, à sa version exacerbée ensuite, la mondialisation néolibérale. Aussi longtemps que l’homme subordonnera son bien-être à la croissance acharnée nécessaire à la production de toujours plus de richesses, il multipliera les risques. Incidemment, en se substituant, sans transition, à l’ordre ancien, profitable à tous, l’ordre nouveau (ou société post-industrielle), bénéfique à quelques uns, nuit tout à la fois à l’homme, à son environnement et peut-être même à la survie de l’un et de l’autre.

Si les scientifiques incontestables sont unanimes sur le diagnostic, il faut toutes affaires cessantes, non pas culpabiliser l’automobiliste qui carbure au diesel comme ses gouvernants le lui ont intimé, mais changer de paradigme économique. Cap sur la décroissance ou sur un juste milieu viable. Qu’on en finisse avec les excès ridicules de la fièvre acheteuse qui font de la ménagère et de son concubin des victimes consentantes d’une surconsommation débile. Entendons-nous ! On n’a pas vocation à se résigner à la condition d’une chèvre frugale qui se satisfait de sucer quelques cailloux. On veut juste manger (et consommer) moins mais mieux. Donc s’affranchir des besoins que des mercantis nous inoculent à grands coups de réclames envahissantes. Si à l’inverse comme l’affirment les climato-sceptiques de tous poils, il n’y a pas le feu au lac, il convient de le dire et de baisser le prix de l’essence.

Quoi qu’il en soit, on s’affole de voir ce bon Monsieur Hulot s’aventurer dans l’arène politique. Ce globe-trotter devenu « ministre de la transition écologique et solidaire », à l’inverse de son homonyme filmé par Jacques Tati dans les fifties, risque d’être privé de vacances poétiques.